L’activiste émirati, Mohammed Al Qaidi, a confirmé que les autorités émiraties ont versé des pots-de-vin afin pour sauver Manchester City, de la sanction de l’UEFA qui accusait le club anglais d’avoir surévalué ses revenus publicitaires portant sur la période 2012-2016.
Le Tribunal arbitral du Sport (TAS), juridiction suprême du monde sportif, a décidé lundi d’autoriser en appel la participation aux prochaines coupes d’Europe de Manchester City, initialement condamné à deux ans de suspension pour manquements au règles du fair play financier.
“Manchester City n’a pas déguisé ses contrats de sponsoring mais a échoué à coopérer avec l’UEFA” – l’instance qui gère le football européen – explique le TAS dans sa décision.
Le club, propriété des Emiratis et entraîné par Pep Guardiola, est donc seulement condamné à verser une amende de 10 millions d’euros à l’UEFA, au lieu des 30 M EUR initialement décidés en février par l’UEFA, qui accusait le club anglais d’avoir surévalué ses revenus publicitaires portant sur la période 2012-2016.
Les Anglais contestaient leur exclusion des Coupes d’Europe par l’UEFA pour non-respect du fair-play financier, une règle mise en oeuvre depuis 2011 par la confédération européenne du football pour limiter les déficits des clubs.
La décision du TAS constitue donc un soulagement pour les Citizens car les pertes financières encourues par une absence de la scène européenne auraient largement dépassé les 100 M EUR par an et n’auraient pas été sans conséquences sur le train de vie du club anglais, d’autant que la Ligue des champions fait office de vitrine pour les propriétaires émiratis de City.
Des joueurs majeurs auraient ainsi pu être tentés de quitter le club pour participer à la C1, une menace qui n’est désormais plus d’actualité.
Dans un communiqué rendu public quasiment en même temps que la décision du TAS, Manchester City “se félicite des implications de la décision d’aujourd’hui, qui valide sa position et l’ensemble des preuves qu’il a pu présenter”, a réagi le club dans un communiqué, précisant que ses conseillers juridiques doivent encore examiner l’intégralité de la décision.
Abou Dabi est le plus riche et le plus puissant des sept émirats qui composent les Émirats arabes unis. L’homme qui contrôle Abou Dabi et dicte sa politique est le frère du cheikh Mansour, le prince héritier Mohammed ben Zayed, plus connu sous le nom de MBZ.
Le président de Manchester City, Khaldoon al-Mubarak, formé aux États-Unis, est un lieutenant clé de MBZ. Il est également PDG de Mubadala, un groupe de plus de 50 milliards de dollars d’actifs qui investit de vastes sommes dans tous les domaines, de l’immobilier aux produits pharmaceutiques.
Le football de la Premier League “est l’un des meilleurs produits de divertissement au monde”, écrivait le vice-Premier ministre émirati lors de son acquisition du club en 2008. Le City Football Group, détenu par Abu Dhabi United Group, est en bonne voie pour devenir un Amazon ou un Disney sous financement émirati, à la tête de plusieurs clubs de football des États-Unis à l’Uruguay, en passant par l’Espagne et la Chine.
Le New York City Football Club, comme Melbourne City et leur club parent, Manchester City, jouent en bleu ciel avec “Etihad Airways” floqué à l’avant du maillot.
En tant que tel, le football, le sport le plus regardé au monde, est devenu une publicité mondiale pour Abou Dabi et un moyen de mettre en pratique la stratégie de “soft power” des Émirats arabes unis. Néanmoins, comme le précise Nicholas McGeehan, ancien chercheur spécialiste des Émirats arabes unis pour Human Rights Watch, les propriétaires de City sont “au courant du fait que c’est une arme à double tranchant”.
Le Manchester City Football Club n’est qu’un investissement parmi de nombreux autres, mais c’est aussi l’investissement qui, comme le reconnaît Moubarak, a de loin attiré le plus l’attention, en bien comme en mal.
Le nuage du fair-play financier qui plane sur City tire ses origines d’une série d’articles publiés par le magazine allemand Der Spiegel. La série d’articles a été construite autour d’une fuite de communication interne qui a dévoilé que le club utilisait des fonds d’Abou Dabi pour payer des contrats de sponsoring. “Nous pouvons faire ce que nous voulons”, avait ainsi écrit Simon Pearce, gourou de la stratégie de marque d’Abou Dabi.
Alors que l’enquête de l’UEFA sur le club est en attente de jugement final, Manchester City a fustigé un “processus insatisfaisant, limité et hostile”, décrivant les accusations portées contre le club comme “totalement fausses”.
Les esquives footballistiques dont Manchester City est accusé se reflètent dans le contraste entre la marque projetée par Abou Dabi et les actions que l’émirat entreprend à la fois à l’échelle locale et au Moyen-Orient.