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Une campagne au Soudan accuse les Emirats arabes unis de financer des mercenaires pour combattre en Libye

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Le porte-parole des Forces de soutien rapide au Soudan, Jamal Jumaa, a déclaré qu’environ un millier de Soudanais ont été transférés en Libye pour combattre comme mercenaires, tandis que 243 autres ont été arrêtés le mois dernier alors qu’ils se rendaient sur le territoire libyen.

Jumah a déclaré dans une interview télévisée que ces personnes étaient transportées en Libye pour combattre en tant que mercenaires en échange d’argent, soulignant que cette position violait la position de neutralité du Soudan envers la crise libyenne.

Jumah a accusé l’une des parties belligérantes, soutenue par un État régional, de financer le transport des Soudanais.

De leur côté, les internautes ont lancé sur Twitter le hashtag # Emirates_Trafficking_Humans pour condamner les politiques d’Abu Dhabi basées sur le recrutement de jeunes soudanais et d’autres de nationalités différentes pour combattre comme mercenaires en Libye.

Des dizaines de Soudanais ont manifesté à Khartoum pour réclamer le retour au pays de proches recrutés selon eux par une entreprise des Emirats arabes unis comme gardes de sécurité mais envoyés par la suite combattre en Libye et au Yémen.

Des groupes d’hommes et de femmes se sont rassemblés devant le ministère des Affaires étrangères, portant des banderoles sur lesquelles on pouvait lire « nos fils ne sont pas à vendre » ou « ramenez nos fils ».

Plusieurs manifestants ont déclaré à l’AFP que leurs proches avaient obtenu des visas pour les Emirats arabes unis à la suite d’annonces dans les journaux soudanais pour le recrutement de gardes de sécurité pour le compte d’une compagnie émiratie appelée Black Shield.

« Mon frère s’est rendu aux Emirats le 20 août, mais depuis six jours, nous avons perdu le contact avec lui », explique Salma Mohamed, une manifestante.

« Nous avons vu sur les réseaux sociaux qu’il avait été transféré avec d’autres personnes en Libye ou au Yémen. Nous n’avons aucune information sur son sort, nous voulons qu’il revienne ».

« Mon fils s’est rendu en septembre aux Emirats arabes unis. Nous avons perdu le contact avec lui depuis dix jours », a déclaré un autre manifestant, Imad Osmane.

« Il s’est ensuite manifesté pour nous annoncer qu’il avait été ramené avec d’autres de Ras Lanouf (Libye) à Abou Dhabi », la capitale des Emirats.

De son côté, le ministère des Affaires étrangères a assuré dans un communiqué qu’il était en contact avec Abou Dhabi pour régler la question « concernant le recrutement de citoyens soudanais comme gardes de sécurité par une entreprise privée des Emirats ».

« Les familles affirment que leurs contrats ont été violés, certains d’entre eux ayant été transférés par l’entreprise vers des champs pétroliers libyens », ajoute le ministère.

Mardi soir, une cinquantaine de jeunes gens revenus d’Abou Dhabi ont tenu un sit-in devant l’ambassade des Emirats à Khartoum.

Ils n’ont pas dit s’ils revenaient de Libye ou du Yémen mais ils ont promis qu’ils maintiendraient leur sit-in jusqu’à ce que tous ceux qui ont été recrutés par l’entreprise émiratie reviennent au Soudan.

Une famille soudanaise a demandé l’intervention du gouvernement transitionnel de son pays, pour récupérer son enfant exploité comme mercenaire par les Émirats arabes unis (EAU), au moment où des documents démontrent qu’Abu-Dhabi a recruté des travailleurs soudanais pour les envoyer combattre au Yémen et en Libye.

La chaîne d’information “Al Jazeera Mubasher” a rapporté, vendredi 24 janvier, le témoignage d’”Abdellah al-Tayeb Youcef”, le frère de l’un des Soudanais dupés, se croyant engagés aux EAU pour travailler dans le domaine de la sécurité, avant de se trouver coincé, dans un camp d’entrainement militaires depuis 3 mois.

“Mon frère s’est présenté pour travailler comme agent de sécurité aux EAU. Mais dès leur arrivée à l’aéroport, lui et plusieurs autres ont été surpris du fait qu’on leur avait demandé d’intégrer un camp militaire, et de s’entraîner à utiliser les armes lourdes”, avait-il raconté.

Il signala que son frère, qui le contactait via Whatsapp, était parti depuis mi-octobre dernier. “La dernière fois que j’ai contacté mon frère par téléphone était mercredi dernier. Depuis, j’ai publié une vidéo et je n’ai pas contacté le gouvernement soudanais… J’ai plus tôt contacté l’agence de voyage à travers laquelle le contrat de travail lui avait été proposé”, avait-il ajouté.

“Mon frère m’a dit qu’il avait été entraîné à manier les armes lourdes, aux EAU, et qu’on lui avait demandé de choisir, entre aller en Libye ou au Yémen, après lui avoir proposé d’importantes sommes d’argent”, expliqua Abdellah Youcef, qui demanda de l’aide pour ramener son frère.

Dès la publication de la vidéo d’Abdellah Youcef, “Wakeep”, une plateforme soudanaise sur “Twitter” a publié des exemplaires des contrats qu’avaient signés les Soudanais, partis aux EAU pour travailler comme agents de sécurité.

“Wakeep” a signalé que le visa de l’une des victime démontrait qu’une compagnie émiratie nommé “Black Shield Security” recrutait des Soudanais pour travailler aux EAU, dans le domaine de la sécurité.

Il signala: “Selon des informations publiées ailleurs, dès leur arrivée aux EAU, les Soudanais ont été envoyés au camp “al-Ghayachi”, où ils étaient privés de leurs téléphones et informés qu’ils seraient chargés de sécuriser des structures en Libye et au Yémen”

“Wakeep” a également  publié un autre document, avec le caché apparent de l’ambassade soudanaise aux EAU et d’autres organismes officiels émiratis, expliquant que la partie qui travaillait pour la compagnie émiratie “Black Shield Security”, au Soudan, était “le bureau de recrutement externe al-Amira”, siégé à Khartoum.

La vidéo du jeune Abdellah Youcef demandant aux autorités de son pays d’intervenir, pour ramener son frère, a déclenché de larges interactions au Soudan, poussant les activistes à demander le lancement d’une campagne sur le hashtag ‘sauver les victimes de la compagnie émiratie’, afin d’aider les centaines de personnes qui ont été dupées.

Selon un rapport publié en décembre par l’ONU, cinq groupes armés soudanais et quatre groupes armés tchadiens ont fourni des milliers d’hommes pour combattre en Libye.

Un rapport distinct de l’ONU sur le Soudan publié en janvier affirme que de nombreux combattants arabes du Darfour, région de l’ouest du Soudan en proie à une guerre civile depuis 2003, et du Tchad voisin combattent comme « mercenaires » à titre individuel en Libye.

La Libye est en proie au chaos depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011.

Deux autorités rivales se disputent le pouvoir, le Gouvernement d’union nationale (GNA) dirigé par Fayez al-Sarraj, reconnu par l’ONU et basé à Tripoli, dans l’ouest, et un pouvoir incarné par Khalifa Haftar dans l’est du pays.

Depuis le 4 avril 2019, la guerre est aux portes de Tripoli: à cette date, le maréchal Haftar, soutenu par la Russie, les Emirats arabes unis et l’Egypte, a lancé une offensive sur la capitale, siège du GNA, de son côté appuyé par la Turquie.

Plus de 2.000 combattants et plus de 280 civils ont été tués, d’après l’ONU. Près de 150.000 Libyens ont été déplacés.

Un cessez-le-feu instauré le 12 janvier à l’initiative de Moscou et Ankara, reste précaire, les deux parties s’accusant de violer la trêve.